Là-bas au bas bêlant des chevreaux t’inoculent
Un venin géant. Des saules tristes aboient des hyènes,
De poire en poire, un contre-aérostat stipule que se pendre à l’envers
N’a jamais fait de quiconque un Néo-Zélandais.
Des framboises, au mépris de la déforestation ambiante de toute éternité ; enfin humaines les terres mitées, alors les fruits rouges comme si c’était un verbe mais n’empêchent les lèvres qui les
goûtent de rêver un moment la couleur, la saveur mauve acidulée, les akènes-stand-losing-you. Ça fait plaisir de se griffer pour les cueillir à pleine maturité, au diable et même encore après les
démangeaisons et les taches de pulpes, ce n’est pas chair payée, juste un choc des cultures depuis l’ambiance ouatée – ça ne veut pas dire électrifiée – mais ça le pourrait tant qu’à imaginer des
petits fruits perchés aux fils de fer barbelés, ceux à l’ancienne les torsadés, pas ceux modernes avec comme des lames de cutter. Le moindre goût de liberté a besoin de ces anicroches, sans
déchirures pas d’escapades.
Pas loin des abricots pornographiques diffusent en continu pour des pince-oreilles délurés puis quelques passants égarés les mêmes fessiers à l’infini, nonobstant de menues différences plus liées à
leurs expositions respectives qu’à un véritable effort d’imagination, ils sont mieux rangés que des parachutistes dans un avion-cargo, à parsemer les branches en longue allée où gisent des abricots
talés, des sœurs catapultées au sol, « à la Newton » comme on dit dans les vergers. Elles peuvent désormais exhaler ce musc rance à l’ivresse prégnante, ou du moins bientôt en couche, sous les
narines des badauds innocents, si ce n’est qu’ils sont là, tant l’espace est prévu pour qu’ils puissent s’y déplacer, dans ce verger. Du coup, l’alibi de leur absence ne tiendrait pas vraiment.
Des pêches, toi, tu n’es pas du genre à guetter la pelote, malheur et graves irritations à qui voudra repousser l’instant de mordre pour profiter encore de ta soie pelucheuse qui se transforme en
torture pour l’infortuné qui n’avait pas à ne pas être là, je l’ai déjà dit : ces vergers sont prévus pour accueillir et voir défiler des Néo-Zélandais renversés comme des crèmes pâtissières ou
délicates, mais bon. Ils sont plus faciles à comprendre les Indiens et leurs scalps quand c’est le moment d’écorcher ton épaisse enveloppe, une petite chair végétale, il semble que ça ne fasse pas
mal, alors le plaisir des lambeaux qui s’arrachent au fruit dégorgeant son jus débordant sur la main, il n’est pas à mettre au bagne.
L’ingrat mène à ta fraise plus sûrement qu’une mèche courte à son bâton de dynamite. Il n’ira pas plus loin préférant planter ses deux genoux en terre pour voir d’un peu plus près, ces petits cœurs
pousser. Des fraises pour un baiser cannibale où nous irions danser, à poil, en fourrure dékératinées, non pas juchés mais chacun de son côté à récolter plus de ses friandises que nos bras en
berceau pourraient en contenir, et tant pis si le verger en ressort avec une mine de ville mise à sac, en nous laissant de satiété entourés des petits toupets verts arrachés puis recrachés par
terre. La fraise a une astronomie toute simple elle est aisée à retrouver et le labyrinthe végétal est peu peuplé de Minotaure, c’est comme un fil d’Ariane de fonction, en série sur tous les
modèles : c’est impossible de se perdre aux fraises, en fait.
Pour ça, plutôt des cerisiers pour se risquer à se retrouver nez à nez de son propre reflet, les oreilles s’acoquineraient des boucles des fruits colorés dans un rouge qui vire au bordeaux quant
elles sont vraiment très sucrées, à deux doigts, ou même quelques heures de ne plus valoir une thune. C’est le bon moment qui serait plus couru si les plus gourmands se décidaient à recracher les
noyaux encore il est bon de le rappeler il faut laisser leur liberté et le peu de spectacles vraiment dommageables qu’ils auront à rencontrer à ces noyaux qui n’ont qu’un rôle mineur au demeurant
sans que ce soit pour autant leur métier, les fondements… Faut dire, c’est con un acrobate c’est à graver sur leurs branches depuis le temps qu’elles disent que quelqu’un va tomber. C’est pas un
raccourci au ciel, un arbre, il ne faut pas l’escalader en demandant plus qu’il ne peut donner, mais un cerisier forcément ça donne de la confusion et ça hypnotise les alpinistes à l’ouest de leur
chaîne de montagnes, pourtant ça ne chante pas, les cerises, c’est pas des sirènes qu’Ulysse aurait changé en fruits rouges.
Autant c’est dangereux les cerises que les pommes ont belle avoir mauvaise réputation en générale, il ne se passe rien dans un pommier, quand un quidam vient manger ses fruits. Limite un badaud le
moquerait de préférer ces parents de compotes aux autres : les framboises, les abricots, les pêches et les fraises et les cerises aussi qui sont bien plus extravertis, tu vas voir que les pommes
vont en appeler à la beauté intérieure pour tenter de faire oublier comme elles sont ennuyeuses avec leurs jaunes, leurs verts éponymes, leur croquant et leurs pectines. C’est presque plus efficace
comme arme de jet que comme dessert, c’est pas que c’est pas bon une pomme juste elle manque un peu de fantaisie parfois, elles sont du genre automne, mais pas du côté sauvage non plus, elles sont
plutôt Robinson que Vendredi en somme et c’est bien le dernier fruit que j’irai manger dans un verger, une pomme.